Rédiger un certificat médical "dans les règles de l'art"

 

Les certificats médicaux

Gérald Quatrehomme

Professeur de Médecine Légale et Droit de la Santé

Université de Nice Sophia Antipolis, Faculté de Médecine de Nice

I Définitions

- Les certificats médicaux sont des documents écrits, rédigés par un médecin, à la demande d’un particulier

- Le but d’un certificat médical est de constater et d’interpréter des faits d’ordre médical

- La rédaction d’un certificat médical a des conséquences potentielles pour le patient, pour le médecin ou pour un tiers

- Le certificat médical engage en toute circonstance la responsabilité du rédacteur.

- Certains certificats sont à haut risque médico-légal : en particulier ceux rédigés de façon hasardeuse à l’occasion de séparations ou de divorces, et notamment les examens d’enfants

- Il convient donc toujours d’expliciter les objectifs du certificat demandé par le patient, de juger de sa nécessité, d’en prévoir la portée, avant d’en débuter la rédaction

- Le certificat médical doit impérativement être différencié des rapports de réquisition et d’expertise, qui obéissent à de toutes autres règles, notamment concernant le secret professionnel

 

II Quand le délivrer

Il existe des certificats obligatoires, prévus par les textes, par exemple certificats de naissance, décès, accident du travail, maladie professionnelle, hospitalisation sous contrainte en psychiatrie, vaccinations, maladies contagieuses. Le Code de Déontologie médicale dispose (art 76 CD) : « L’exercice de la médecine comporte normalement l’établissement par le médecin, conformément aux constatations médicales qu’il est en mesure de faire, des certificats, attestations et documents dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires … ».

Les certificats sont  facultatifs dans tous les autres cas. « Le médecin doit, sans céder à aucune demande abusive, faciliter l'obtention par le patient des avantages sociaux auxquels son état lui donne droit » (art 50 CD).

Le médecin peut toujours refuser de délivrer un certificat médical, selon sa libre appréciation : « … sans céder à aucune demande abusive … » (art 50 CD). S’il refuse, il doit alors en informer le patient et lui en expliquer les raisons. S’il décide de le rédiger, il faut prendre garde au contenu du certificat, car : « La délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite » (art 28 CD).

 

III Qui peut rédiger un certificat médical

Tout médecin généraliste ou spécialiste a la possibilité de rédiger des certificats médicaux.  

            Il existe cependant des cas particuliers :

- certificat de décès : il doit être rédigé par un Docteur en médecine. L’interne, qui est statutairement un médecin en formation,  s’il n’a pas encore soutenu sa thèse, ne peut donc pas signer un certificat de décès. Il existe une tolérance pour les internes qui remplacent un médecin (avec une licence de remplacement délivrée par le Conseil de l’Ordre).

- certificat de non contre-indication à la pratique sportive ; certaines fédérations à risque exigent que le médecin soit également titulaire d’un diplôme reconnu de médecine sportive

 

IV Comment le rédiger

 A) Conditions de fond

- identité du patient : elle doit être clairement indiquée. Si le médecin ne connaît pas le patient et que celui-ci ne présente pas de pièce d’identité, il faut être prudent et écrire : « déclarant se nommer .. »

- identité du médecin

- date exacte de l’examen (76 CD). Ce point est capital, car il ne faut jamais anti-dater ou post-dater un certificat médical (il s’agirait d’un faux). Par contre il peut arriver que la date de la rédaction soit différente de la date de l’examen. Il faut toujours clairement indiquer la date exacte de l’examen du patient

- l’heure de l’examen. Il peut être nécessaire d’indiquer l’heure exacte de l’examen, par exemple dans les certificats de coups et blessures volontaires

- signature du médecin

- Le certificat médical ne peut être rédigé qu’après examen clinique du patient, personnellement réalisé par le médecin qui signe le certificat

- la distinction entre les allégations de la personne et les constations objectives du médecin est fondamentale. Les allégations (antécédents, symptômes ressentis) sont des données d’interrogatoire ; elles sont retranscrites avec le conditionnel et les guillemets. L’interrogatoire doit permettre d’obtenir les renseignements nécessaires, sans toutefois s’immiscer dans la vie privée du patient ou les affaires de famille (51 CD).

Les constatations sont des faits objectifs recueillis par l’examen clinique ou des examens complémentaires. Elles peuvent être positives ou négatives.

- la rédaction doit être sincère, retranscrivant avec exactitude les allégations du patient comme les constatations objectives. La « délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite » (art 28 CD) ; et « tout acte de nature à procurer au patient un avantage matériel injustifié est illicite » (art 24 CD). La véracité du certificat médical est bien entendu fondamentale.

- le diagnostic ne doit pas être habituellement porté sur un certificat médical, car celui-ci passe souvent ultérieurement dans des mains non médicales. Il faut expliquer ce point au patient, et n’inscrire un diagnostic qu’après réflexion et beaucoup de prudence

 

 

B) Conditions de forme

- Il existe des imprimés spécifiques pour les certificats obligatoires. Pour les certificats facultatifs, celui-ci est habituellement rédigé sur un papier à en-tête du médecin.

- La condition de forme la plus importante est la lisibilité. Un tiers des certificats est peu lisible, certains totalement illisibles, ce qui peut nuire au patient : « Le médecin, au service de l’individu et de la santé publique, exerce sa mission dans le respect de la vie humaine, de la personne, et de sa dignité » (art 2 CD).

- le certificat médical doit être rédigé en français (76 CD)

- Le style doit être clair, simple, précis.

 

 

V A qui remettre le certificat médical

1) le certificat médical est « établi à la demande de l’intéressé, et remis en mains propres », formule qui figure en conclusion du certificat médical. Cet impératif absolu permet de préserver le secret professionnel médical (226-12 et 13 CP ; 4 CD)

En conséquence, il ne faut jamais remettre un certificat médical à un avocat, à la Police ou la Gendarmerie (en dehors des rapports de réquisition), à la Justice (en dehors des rapports de réquisition ou d'expertise), au conjoint (certains certificats remis au conjoint ont été utilisés par celui-ci dans une procédure de divorce, bien entendu ignorée du médecin). Il faut rappeler que le délit de violation du secret professionnel est constitué en cas de révélation à un tiers d’informations recueillies au cours d’un acte médical, même en l’absence d’acte volontaire (« de volonté de nuire ») de la part du médecin

 

2) sauf dérogations légales prévues par les textes

 

Il existe des dérogations obligatoires et facultatives, des dérogations nouvelles depuis la loi du 4 mars 2002, et beaucoup de situations particulières qui peuvent poser des problèmes au médecin. Dans tous ces cas particuliers, il faut s’interroger sur l’intérêt du patient que l’on soigne ; c’est cet intérêt qui doit nous guider, comme nous l’indique le Code de Déontologie médicale.

 

3) et sauf impossibilité

 

Si le sujet est dans le coma, le certificat sera rédigé avec une particulière prudence, et remis à la famille, au proche qui s'occupe des intérêts du patient, ou à la personne de confiance, si celle-ci a pu être désignée par le patient avant que le coma ne survienne.

 

VI  Le modèle-type de certificat

Il comporte :

 

(a) identité du médecin ;

 

(b) identité du patient ;

 

(c) allégations : antécédents, description des faits, doléances ;

 

(d) constatations objectives lors de l'examen ;

 

(e) examens complémentaires éventuels ;

 

(f) discussion ;

 

(g) conclusions ;

 

(h) date et signature

 

(i) « certificat établi à la demande de l'intéressé et remis en mains propres ».

VII Conséquences médico-légales

1) Pour le patient

 

Nous ne pouvons qu’insister à nouveau sur l’importance du certificat, notamment le certificat médical initial, pour établir objectivement les lésions subies par le patient, et en permettre la réparation ultérieure, que ce soit en matière civile (indemnisation des préjudices et des séquelles) ou en législation sociale (accident du travail, maladie professionnelle).

 

2) Pour un tiers

 

Le certificat de constatation de coups et blessures a un très grand intérêt également pour le tiers responsable de l’agression ou de l’accident. En effet, après recueil des allégations de la victime, et indication des constatations objectives du médecin par son examen clinique et d’éventuels examens complémentaires, ce certificat se termine par la fixation d’une « Incapacité Totale de Travail au sens du Code Pénal ». Malgré son nom, l’ITT au sens du Code Pénal n’a aucun rapport avec un éventuel arrêt de travail : ce qui est démontré par le fait que l’on fixe des ITT pénales aux enfants ou aux personnes sans emploi ou retraitées. L’ITT au sens du Code Pénal est une perte majeure de l’autonomie de la personne dans sa vie quotidienne (se lever, se laver, s’habiller, s’alimenter, faire sa toilette, aller aux toilettes etc.). Elle est donc très restrictive. Néanmoins la jurisprudence a indiqué que « total » ne signifiait pas « absolu » : il y a donc une certaine marge d’appréciation. Le retentissement psychologique fait partie intégrante de l’ITT pénale, mais là encore il doit être total, ce qui est très rare.

 

En tout cas l’ITT pénale fixée par le médecin oriente le tribunal compétent (Tableau). Il faut souligner cependant que le magistrat n’est pas tenu par l’avis du médecin, et peut tout à fait, par exemple, correctionnaliser une affaire, en fonction de la législation (femmes battues par leur partenaire) et des circonstances qui lui sont présentées. L’inverse est également possible, notamment parce que de nombreux médecins confondent l’arrêt de travail et l’ITT pénale.

 

3) Pour le médecin

La rédaction d'un certificat médical est toujours susceptible d'engager la responsabilité du médecin rédacteur. Les médecins sont souvent très  prudents dans la rédaction d’un rapport de réquisition, mais parfois très imprudents dans la rédaction d’un certificat médical. Or il ne faut jamais oublier lors de la rédaction que tout certificat médical peut être produit en Justice.

ITT penale

VIII Conclusions

- La rédaction d’un certificat médical ne doit en aucune façon être banalisée.

 

- Le médecin doit toujours réfléchir avant d’accéder à la demande du patient. Il doit expliciter l’objectif du certificat de façon précise, en évaluer la portée et les conséquences

 

- le certificat médical doit être remis en mains propres au patient demandeur, sauf dérogations légales, ou impossibilités, prévues par les textes. Il ne faut pas remettre un certificat médical à un avocat, à la police ou gendarmerie, au conjoint

 

- il faut se rappeler qu’un certificat médical peut toujours être produit en justice

 

- la prudence habituelle doit se renforcer dans certaines circonstances : séparation, divorce, gardes d’enfants, maltraitance, agressions sexuelles alléguées, notamment chez des enfants

 

 

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